Escroquerie au dépôt-vente : l’ex-gérant condamné à rembourser

 dans l’affaire de l’escroquerie au dépôt-vente de camping-cars qui s’est tenue à Montredon-des-Corbières entre 2008 et 2011.

Rares sont les affaires jugées par le tribunal correctionnel de Narbonne dont la perception est aussi largement modifiée après une plaidoirie. Pourtant, cet après-midi, celle de Maître Cohen du barreau de Toulouse s’est apparentée à une leçon de droit à destination des magistrats. Avocat de la défense, il représentait Jérémy Hoffner et son père Jean. Le premier devait répondre, notamment, d’abus de confiance, d’usage de faux, de dissimulation d’actifs après une banqueroute ou encore d’abus des biens d’une SARL à des fins personnelles. Le second n’était là que pour complicité d’abus de confiance.

En l’espèce, les faits reprochés à Jérémy Hoffner sont le détournement de tout ou partie de certaines ventes de camping-car. Pour les nombreux plaignants, la façon de procéder est similaire. Ces derniers déposent leur camping-car en dépôt-vente à la société Terre d’Émeraude auprès de son gérant Jérémy Hoffner, mais le contrat signé mentionne également la société voisine, Loisirs Méditerranée. Parfois, le véhicule est également garé sur le parking de Loisirs Méditerranée, alors même que le contrat est signé avec Terre d’Émeraude.
Une proximité trouble qui l’est encore plus, au regard des magistrats, quand ils exposent que l’argent des véhicules vendus était encaissé par Loisirs Méditerranée. Et surtout, les plaignants entendus hier n’ont jamais récupéré l’argent de ces transactions.

Pourtant pour Jérémy, tout était clair : «  Ma société, Terre d’Émeraude, a été fortement perturbée par des travaux de voirie longs de 18 mois. Le chiffre d’affaires a périclité, c’est pourquoi j’ai collaboré avec Loisirs Méditerranée en qualité d’apporteur d’affaire. Mais tout était clair sur les contrats  ». En 2010, la société est placée en redressement, avant d’être liquidée en 2011. «  Ces procédures ont fait que je n’ai pas eu accès à l’argent des camping-cars  » se justifie Jérémy.
Lorsque dans les auditions, le gérant de Loisirs Méditerranée explique avoir créé cette entreprise à la demande de Jérémy Hoffner, et qu’il n’était qu’un gérant de paille pendant que le prévenu était le gérant de fait, ce dernier crie au complot.
Sur ce point, la cour d’appel de Montpellier a statué en juin dernier, retenant que la gérance de fait de M. Hoffner n’était pas prouvée.
Alors que ses clients sont mis en difficultés par le ministère public, qui leur reproche des contradictions entre leurs auditions de 2013 et leurs déclarations du jour, Maître Cohen entre dans une colère telle que le président Frédéric Ebel décide de suspendre la séance.

Au retour des magistrats, les réponses des prévenus sont laconiques, à base de « Je ne me souviens pas », « C’est une erreur dans ma déclaration précédente » ou encore « Ma signature a pu être imitée ».
Dans ses réquisitions, le ministère public a demandé une peine de 3 ans dont 18 mois avec sursis et amende de 15 000 euros et interdiction définitive de gérer une société pour Jérémy, et 12 mois dont 9 avec sursis, amende de 5 000 euros et interdiction de gérer pendant 5 ans pour Jean.
Peu avare de citations bien senties ou d’effets de voix, Maître Cohen est alors entré en scène pour tenter de renvoyer les magistrats à leurs chères études. C’est tout du moins l’impression qu’il a donné. Tour à tour, il a développé les aspects éludés dans la procédure, en dépit de leur importance cruciale. Comme le temps écoulé, qui selon lui aurait pu, et dû, être raccourci à quelques mois plutôt qu’à près de 6 ans. Comme le silence du tribunal sur les 1 300 opérations de dépôt-vente réalisées par Jérémy Hoffner sans aucun problème. Comme l’absence d’enquête sur le train de vie de ses clients. Comme la rédaction des contrats signés, parfaitement valable en droit. Ou enfin comme l’arrêt de la cour d’appel de Montpellier, éludé par le tribunal.
Et d’achever par une demande de relaxe de Jean et Jérémy, ajoutant cette citation de Chamfort : «  La meilleure philosophie, relativement au monde, est d’allier, à son égard, le sarcasme de la gaieté avec l’indulgence du mépris  ».

Le tribunal a décidé de relaxer Jean Hoffner. Son fils Jérémy a été relaxé de certaines mentions, dont les usages de faux ou la banqueroute, mais coupable d’abus de bien sociaux et de six abus de confiance. Il est condamné à payer les ventes des véhicules de six victimes, à 5 000 euros d’amende, à une interdiction totale de gérer, ainsi qu’à 18 mois de prison dont 9 avec sursis.

Article G.C L’Independant

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